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Vie sociale des données : Enquête sur l'Indice de développement Humain (IDH)

L’histoire de l’IDH

L’Indice de Développement Humain (IDH) nait en 1990 sous l’impulsion de Mahbub ul Haq, économiste, homme politique et banquier pakistanais. En effet, début 1989, quittant sa fonction de ministre des Finances du Pakistan et en collaboration avec l’économiste indien Amartya Kumar Sen, il va proposer à William H. Draper III, alors administrateur du PNUD (Programme des Nations unies pour le Développement), la création d’un reporting annuel de l’évolution de l’humanité. Il compte prendre en compte différents critères tels que l’espérance de vie à la naissance, le niveau d’éducation ou encore le revenu par habitant.

Cette initiative vient d’une critique qui nait à la fin des années 1960, début des années 1970 : le PIB par habitant ne rend pas compte de la notion de bien-être et se contente de quantifier le revenu national par rapport à l’individu.En effet, Mahbub estimait que la notion de PIB avait créé l’illusion qu’augmenter la production nationale signifiait augmenter le bien-être individuel ou collectif.
Il considérait ce nouvel indice comme un rempart face aux gouvernements qui ne jurent que par l’augmentation du PIB, parfois via des productions néfastes pour les populations ou l’environnement.

Le succès de ce nouvel indice est dû en partie au soutien d’Amartya Sen, prix Nobel d’économie en 1998, qui longtemps sceptique a fini par reconnaître son utilité : « Nous avons besoin d’une mesure, disait Mahbub, aussi simple que le PNB – un seul chiffre –, mais qui ne soit pas aussi aveugle que lui face aux aspects sociaux de la vie humaine. » Il poursuivait : « Mahbub espérait non seulement que l’IDH améliorerait, ou du moins compléterait utilement le PNB, mais aussi qu’il susciterait un intérêt pour les autres variables qui sont amplement analysées dans le Rapport mondial sur le développement humain. »


La création de ce nouvel indice fut l’opportunité pour le PNUD d’évaluer la coopération internationale, la solidarité internationale et les divers programmes de développement nationaux engagés depuis la fin de la seconde guerre mondiale. En effet, avant la création de l’IDH, la publication qui évaluait les politiques de développement nationales était le rapport annuel sur le développement publié par la Banque Mondiale, laissant essentiellement transparaitre l’aspect économique du développement. Les institutions financières régissaient alors ces programmes de développement avec des engagements d’ajustements structurels que les pays en développement devaient mettre en place pour pouvoir bénéficier de l’aide financière de ses institutions. Cette époque était aussi celle de l’impulsion du « consensus de Washington » ; établi entre la Banque Mondiale, le FMI (Fonds Monétaire International) et le département du Trésor américain ; qui prônait le renouveau du libéralisme économique via l’ouverture des marchés, le contrôle de l’inflation, la discipline budgétaire, la privatisation et la déréglementation, créant ainsi de grandes inégalités économiques.

Avec l’impulsion Mahbub ul Haq, le PNUD publie chaque année le Rapport Mondial sur le Développement Humain qui se base sur l’IDH. Le bien-être ainsi que l’épanouissement actuel et potentiel de l’être humain deviennent alors des considérations aussi importantes que celles économiques. Parmi les différentes évolutions de l’IDH, on peut notamment en citer 2 relatives au critère du niveau d’éducation : - 1991 : cette année voit le critère du niveau d’éducation ajusté : on lui ajoute le nombre moyen d’années de scolarisation (comptant pour 1/3 de la note) en plus du taux d’alphabétisation des adultes (comptant lui pour 2/3 de la note). - 1995 : la modification de 1991 est révisée : le nombre moyen d’années de scolarisation ne reflète pas fidèlement la réalité. Il va lui être préféré le taux agrégé de scolarisation dans le primaire, le secondaire et le supérieur.

La version hybride de l’IDH depuis 2010 peut être représentée par ce schéma :

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De plus, le PNUD souhaite aller plus loin puisque dans le Rapport Mondial sur le Développement Humain de 2010 est créé l’IDHI (Indice de Développement Humain ajusté selon les Inégalités). Ce nouvel indice vient compléter l’IDH car selon ce rapport, « l'IDHI est le niveau réel de développement humain [car tenant compte des inégalités] » et que « l'IDH peut être vu comme un indice de développement humain “potentiel” ».

Pour finir, dans sa volonté de prendre en compte de plus en plus de données pour évaluer le développement humain, le PNUD introduit dans son rapport annuel de 2019 le GDI (Gender Development Index). Celui-ci prend en compte les disparités liées au sexe, soit les différences de situation de vie entre les hommes et les femmes d'un pays considéré. Plus précisément, il reprend les variables de l’IDH tout en incluant les inégalités de sexe.



Comment est calculé l’Indice de Développement Humain ?

L’Indice de Développement Humain est un indice composite. Il est élaboré à partir de la moyenne géométrique de 3 sous-indicateurs, considérés clefs dans l’évaluation du « développement humain ». Compris entre 0 et 1, de l’évaluation la plus basse à la plus haute, il repose donc sur les moyennes respectives de : L’espérance de vie à la naissance. A travers cet indicateur de santé, une mesure indirecte des conditions de vie à venir des individus est estimée, via la satisfaction de besoins essentiels tels que l’accès à une alimentation saine, à l’eau potable, à un logement décent, ainsi que leur accès à la médecine et aux soins. Ces données sont fournies par le Département des Affaires économiques et sociales de l’ONU. Le niveau d’éducation. Cette mesure du savoir des populations évalue la durée moyenne de scolarisation des adultes de plus de 25 ans (évaluée par Barro et Lee (2010)) ainsi que la durée obligatoire ou attendue de scolarisation pour les enfants scolarisables (mesurée par l’Institut de statistique de l’UNESCO). Ce sous indicateur entend est significatif dans la capacité d’un individu à se montrer autonome en milieu social, comme professionnel. Le revenu national brut par habitant. Révélateur du niveau de vie d’un individu, au sein d’une société, cet indice calculé officiellement par le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale est le logarithme du revenu brut par habitant en parité de pouvoir d'achat. Son calcul met en lumière des éléments relatifs à la qualité de vie, comme l’accès à la culture, aux transports, ou encore aux biens et services d’une population.

Le PNUD endosse également la responsabilité de mettre la composition et la méthodologie de l’IDH en révision, à fréquence régulière, en réponse notamment à l’observation de variations conséquentes et/ou alarmantes. C’est pour cette raison que l’indice évolue régulièrement, afin d’affiner sa justesse. Nous pouvons ainsi constater la disparition de la prise en compte du niveau d’alphabétisation ou encore du PIB par habitant, considérés inadaptés voire obsolètes dans l’établissement d’un Indice de Développement Humain performant et juste.

La publication officielle de l’IDH est effectuée chaque année. Le rapport annuel est construit sur les données recueillies deux ans auparavant, dans un souci de disponibilité et de pertinence des données utilisées. A titre d’illustration, l’IDH d’un pays en 2018 est fondé sur les données recueillies à l’issue de l’année 2016. Malgré cette prise de recul, il est à noter que l’accès aux données n’est pas suffisant à la mesure d’un IDH correct dans certains pays. En 2021, c’était le cas de Monaco, la Corée du Nord, Nauru et la Somalie.


Formules

La mise en place du calcul de l’IDH par moyenne géométrique visait, lors de son instauration, à empêcher que la tendance extrême d’un des trois indicateurs soit compensée par le résultat des deux autres. En autres termes, si l’un des indicateurs est très bas pour un pays, alors que les deux autres sont corrects voire hauts, la moyenne géométrique laisse cette tendance inférieure transparaître dans l’IDH final.

Le calcul de l’IDH se fait en 2 étapes.

I - Création des indices dimensionnels

La 1re étape consiste à calculer les trois sous-indices de l'IDH. Afin de pouvoir les agréger dans un seul indicateur – l’IDH -, la longévité, l’éducation et le revenu sont ramenés à une échelle comprise entre 0 et 1. De ce fait, la valeur maximale de chacun des indices peut être considérée comme référence idéale, ou objectif auquel tendre, pour tous les pays. Le tableau suivant indique les valeurs maximales et minimales pour les sous-indices de l'IDH paru en 2019, fondé sur les données de 2017 :

image

Une fois que les valeurs minimales et maximales sont définies, les sous-indices sont ramenés entre 0 et 1 avec la formule : imagenet logo

Deux indicateurs construisent le sous-indice relatif à l’éducation : la durée obligatoire ou attendue de scolarisation par l’Etat étudié. la durée moyenne de scolarisation par individu. Encore, l’usage de la moyenne arithmétique accorde délibérément un poids égal aux deux indicateurs étudiés. Ces deux mesures agrégées forment le Le même procédé de rapport entre 0 et 1 est effectué pour chacun des deux autres indices, via le même processus d’évaluation des valeurs minimales et maximales.


II – Calcul de la moyenne géométrique des sous-indices

Après l’évaluation des trois sous-indices, la moyenne géométrique est calculée, grâce à la formule précédemment évoquée.



Les usages de l’IDH

Nous allons désormais étudier les usages que peuvent être fait de l’IDH. A l’origine, celui-ci permet d’évaluer le niveau de développement des pays en se fondant non pas sur des données strictement économiques, mais sur la qualité de vie de leurs ressortissants. Comme nous l’avons vu, il a été créé pour pallier les limites du PIB par habitant qui évalue seulement la production économique sans prendre en compte le bien-être des populations, ce qui peut le modifier grandement. Les trois sous indicateurs qui le composent, que sont le PIB par habitant, l’espérance de vie à la naissance et le niveau d’éducation des enfants de 17 ans et plus comme nous l’avons vu dans les méthodes de calcul fondent les principaux usages que l’on va faire de l’IDH.

Etant un indicateur, son but est de mesurer le développement humain. Grâce à cette mesure et la « note » attribuée entre 0 et 1, il sera possible d’identifier les pays « à risque » et par conséquent d’apporter des solutions concrètes pour rétablir un meilleur niveau. L’IDH, comme tout indicateur, sert de point de référence en ce sens qu’il permet de mesurer la progression dans le temps et d’effectuer des comparaisons dans l’espace. L’IDH a deux points de référence, avec le minimum qui vaut 0 et le maximum qui vaut 1.

Premièrement, nous allons voir son usage principal, celui pour lequel il a été créé puis nous verrons en suite les usages détournés qui ont pu être fait de cet indicateur, des années suivant sa création.


I - Les principaux usages de l’IDH

Dans un premier lieu, il permet de mieux mesurer les inégalités mondiales et de trouver des solutions aux problèmes d’éducation, d’accès à la santé et aussi de pauvreté. C’est l’usage principal de l’IDH qui découle de son calcul et de sa composition. - Concernant les problèmes d’accès à la santé, ils seront mesurés par le sous indicateur « santé » qui se base sur l’espérance de vie à la naissance. Cette variable n’a pas été modifiée au cours des ajustements de calcul de l’IDH qui ont pu être fait par le PNUD. - Concernant les problèmes d’éducation et surtout d’accès à l’éducation, ceux-ci vont être calculés en se basant sur le sous-indice « niveau d’éducation ». Ce sous-indice sera calculé grâce à X variables, ce qui lui permet d’être le plus fiable possible. Il combine la variable de la durée moyenne observée de scolarisation (qui représente le niveau d’éducation de la population adulte actuelle qui est âgée de plus de 25 ans) ainsi que d’une variable de durée attendue de scolarisation, qui sera définie par l’UNESCO (nombre d’années de scolarisation dont un enfant en âge d’entrer à l’école peut espérer bénéficier si les taux de scolarisation par âge devaient demeurer inchangés tout au long de la vie de l’enfant). - Concernant les problèmes de pauvreté, l’IDH constitue encore une fois un outil qui permet de trouver des solutions à ces problèmes. Il va permettre une meilleure compréhension de la fracture sociale entre “Pays du Nord” et “Pays du Sud”, c’est-à-dire enter les pays développés et en développement, depuis plus de 50 ans. Amartya Sen, à l’origine de l’IDH, parle de cette fracture sociale comme le “rideau de fer des inégalités”. . En se basant sur les données issues du rapport mondial sur le développement humain de 2021, on obtient cette cartographie interactive de l’IDH dans le monde.



L’IDH va donc permettre de cibler certains pays (ceux pour qui l’indicateur sera trop faible) dans le but de les aider. Les aides qui seront prises sont une conséquence d’un IDH faible mais sont indépendantes de celui-ci. L’IDH joue un rôle d’alerte des gouvernements et organisations, et encore une fois de mesure, mais il ne peut en aucun cas garantir que des actions seront mises en place pour assurer une progression positive du développement humain. Parfois aussi, des évènements conjoncturels peuvent l’affecter sensiblement sur une période, tel que des guerres ou les crises économiques

Enfin, grâce aux mesures de l’IDH de chaque pays, un classement rendu public sera établi par le PNUD (autorité gestionnaire de l’IDH). Ce classement constate les évolutions et régressions effectuées par les différents pays du monde en matière de développement (cela va permettre de constater l’effectivité des mesures et engagements pris individuellement par les différents Etats mais aussi par les coalitions internationales à la suite de la publication des résultats de cet indicateur). Par exemple, le gouvernement d’Ottawa avance régulièrement que le Canada est le meilleur pays au monde en matière de « développement humain ». Pour le prouver, on cite le score attribué par le PNUD puisque le Canada s’est classé en tête à plusieurs reprises, devant les États-Unis et le Japon avec une note dépassant 0,93.


II - Les usages détournés répondant à des phénomènes de société actuels

Dans une deuxième partie, il est possible de voir que l’IDH est un indicateur standard qui peut servir de base à la création d’autres indicateurs qui vont mesurer des choses plus spécifiques grâce à l’ajout de variables ou de sous-indicateurs indépendants. Voici quelques exemples de ce qui peut être fait pour utiliser l’IDH et répondre, ou mesurer des problèmes de société actuels.

Tout d’abord, il est possible de comparer les inégalités de genre en comparant l’IDH des hommes et des femmes. En 1995, l’indicateur de participation des femmes à la vie économique et politique a été créé. Désormais, d’autres indicateurs plus précis permettent également de comparer ces inégalités, notamment l’indice de développement du genre ou indice des inégalités de genre.

Le second, IIG, permet de présenter le désavantage relatif des femmes, c’est-à-dire les pertes en termes de développement humain qui vont être causées par les inégalités homme femme, toujours dans les trois dimensions initiales de l’IDH que sont la santé, l’éducation et la pauvreté. Cet indicateur, sur la base de l’IDH, va également varier entre 0 et 1 selon que les inégalités soient respectivement faibles ou fortes. La prise en compte des inégalités dans les pays peut considérablement modifier le classement initial du PNUD. Par exemple, en 2014, la France occupait la 22ème place selon l’IDH mais la 13ème place selon l’indice d’inégalité de genre. - Sur l’aspect de la santé, celui-ci sera ciblé sur la santé liée aux fonctions reproductives. Il va notamment inclure de nouvelles variables telles que le taux de mortalité des mères à l’accouchement ou encore le taux de fécondité des adolescentes. - Sur les autres aspects, les points concernant l’accès au marché de l’emploi et les écarts salariaux seront mis en évidence.

L’IDH peut aussi servir d’indicateur standard auquel on ajoute d’autres variables pour conduire certaines études telles que celles associées aux problématiques du développement durable. Par exemple, il a été utilisé pour la construction d’un indicateur de soutenabilité environnementale, enjeu central actuel. Enfin, nous pouvons parler de l’indicateur de pauvreté multidimensionnelle, IPM, qui permet d’intégrer les déprivations multiples dont peuvent souffrir chaque personne sur les trois dimensions. Contrairement à l’IDH, sa méthode de calcul sera particulière car toutes les données seront extraites d’une même enquête. La mesure de la pauvreté sera, comme son nom l’indique, multidimensionnelle car elle se basera sur les conditions de vie. Pour autant, il manque de nombreuses variables telles que le taux de chômage ou le taux de pauvreté monétaire relative. Il découle de l’IPH qui était spécifique aux pays développés et en développement avec une certaine pondération.

Pour un dernier exemple et pour nuancer, il est possible de voir que l’IDH est un indicateur qui peut finalement intégrer son objectif principal qu’est « l’humain » dans toutes les sphères notamment avec la création d’indicateurs tels que l’IDHE : l’indice de développement humain des entreprises qui observe le bien-être des salariés au sein d’une entreprise.

Ces indicateurs, en quelques sorte des indicateurs réajustés qui se basent sur l’IDH, ont donc deux intérêts majeurs : ils limitent par un choix technique (le recours à la moyenne géométrique) l'incidence de la « compensation » totale entre plusieurs dimensions de l'indicateur composite mais ils tiennent aussi beaucoup plus compte des problèmes de sociétés, que ce soit les inégalités sociales et de genre, ou l’environnement. Ils visent toujours à améliorer la vision que donne l'indicateur du développement humain. Pour autant, cette plus grande pertinence statistique s'est accompagnée d'une complexification de l'outil ce qui l’éloigne de la compréhension globale par la population. Pour conclure, l’IDH, grâce à sa double dimension, qualitative et quantitative, permet de nombreux usages, qu’ils soient ceux prévus originellement ou qu’ils soient différents grâce à l’ajout de nouvelles variables pour répondre à de nouveaux problèmes de société.



L’IDH n’est pas parfait

On entend souvent que le pays où il ferait le mieux vivre serait la Norvège... Cependant, les personnes soutenant cette proposition se basent quasiment tous sur l’indice de développement humain... Et si finalement la réalité était différente ?

Cet indicateur est souvent apprécié par de nombreux gouvernements et analystes, mais il ne fait pas l’unanimité et est quand même source de critiques et de débats, que ce soit l’espace public ou auprès d’économistes et professionnels. De nombreux colloques et conférences ont lieu à ce sujet au sein de cercles d’économistes et cela partout dans le monde. Ces réunions font l’objet de réelles remises en question de l’instrument mis en avant par le PNUD, chacun y apporte ses arguments et éléments de controverses, mais on y évoque aussi des alternatives ou encore de nouvelles propositions de calculs.


Cercle économiste d’Aix-En-Provence , 6 Juillet 2019, LES INDICATEURS SONT-ILS EN PERTE DE SENS ?


I - Les critiques de L’IDH

Nous allons dans cette première partie mettre en avant les faiblesses majeures de cet indicateur, qui font l’objet de nombreuses critiques.

Dans un premier temps, évoquons l’aspect éducation que prend en compte l’IDH. Le taux d’alphabétisation mis en exergue dans le calcul est estimé à partir du nombre d’années de scolarisation. Cependant, d’un pays à un autre nous n’avons pas la même progression et le même nombre d'années de scolarité mais cela n’est pas forcément corrélé avec le taux d’analphabétisation.

Dans un second temps, le calcul se fait avec trois composantes : Indice d’espérance de vie, Indice d’éducation, Indice de revenu). Ces variables sont différentes, et exprimées avec des valeurs différentes et pourtant correspondent chacune à 1/3 du résultat. Cela entraîne un problème de compromis égaux, puisque cela voudrait dire que l’on pourrait avoir un même IDH en combinant les valeurs différemment et donc apporter par exemple une valeur économique à l’espérance de vie. A cela, il faut ajouter la qualité qui n’est prise en compte ni en termes d’éducation, ni en termes de santé et qui pourtant joue un rôle majeur pour éclairer de manière plus adéquate sur le développement d’un individu. De plus, l’IDH peut être difficile à calculer au-delà de l’échelle régionale à cause de l’indisponibilité de certaines données telles que le taux d’alphabétisation.

Enfin, la critique qui revient le plus régulièrement est le choix des composantes qui composent cet indicateur. En effet, de nombreuses critiques sont orientées sur l’absence de certaines variables dans ce calcul qui devraient y être intégrées, tel que le niveau de bien-être, le chômage ou encore les inégalités. D’autres indicateurs comme le coefficient de Gini peuvent pallier l’absence de certaines variable, en l’occurrence les inégalités au sein d’un même pays dont on mesure l’IDH, comme le Qatar qui semble surclassé par l’indice de revenu, et dont l’IDH ne reflèterait donc pas la réalité. Par ailleurs, certains aspects ne sont jamais pris en compte comme ceux du développement tel que la préservation de l’environnement.

A cause de ces critiques, qui soulignent les faiblesses de cet outil, une sorte de défiance croissante envers cet outil émerge malgré la volonté du PNUD de vouloir actualiser ses méthodes de calculs afin d’atteindre un IDH de plus en plus efficient.

Cet outil ne faisant pas l’unanimité, de nombreuses personnes, organismes, et même les Nations Unies proposent des alternatives et outils complémentaires tel que l’indice de pauvreté multidimensionnelle qui a pour but de mettre en avant les inégalités, et donc de mieux cerner l’IDH avec un calcul supplémentaire.


II - Qu’en pense le PNUD ?


History of the Human Development index, and its major strengths and weaknesses, avril 2018


Nous avons pu voir les critiques émises par de nombreux acteurs, mais finalement quel est l’avis de l’organisme à l’origine de cet indicateur ?

L’université de Genève a pu dans le cadre d’une interview poser des questions à Selim Jahan, Directeur de l’Office du rapport du développement humain.

Celui-ci s’avoue assez fier et satisfait de cet outil et notamment des grands bienfaits que l’on peut en déduire. L’outil reste tout de même plus complet que le PIB/habitant et pourtant assez simple (donc accessible) et efficace. Il met en avant notamment le fait que cet indicateur soit souvent pris comme exemple pour faire pression ou revendiquer certains changements en termes de politiques publiques de la part des gouvernements.

Effectivement, on retrouve l’IDH dans les revendications de certaines associations, partis politique, au sein de l’espace public et même au sein d’un espace public plus « virtuel » : Twitter. Il demeure donc une certaine confiance envers cet indicateur qui, malgré toutes les critiques formulées à son égard, reste un appui à certains arguments utilisés au sein du débat public.


Complètement foireux. C'est sur un temps très court et à coup d'argent public transformé en dette pour atteindre des niveaux très préoccupants. En 10 ans, le rang IDH de la France est passé du 20e au 27e, l'Espagne nous a dépassé et Macron en est grandement responsable! pic.twitter.com/YzAYcUKxMY

— Vincent de Vincennes (@VincentdeVince2) May 21, 2022

Cependant, Monsieur Jahan se montre adepte de l’auto-critique et met en avant certaines faiblesses de l’outil sur lequel il travaille. Dans un premier temps, il rejoint certaines critiques et souligne le fait que ce soit un index composé et donc que dans certains cas, il perd en prédictibilité et robustesse. Il évoque également le fait que les valeurs, lorsqu’elles sont intégrées au calcul, sont des quantités mesurées sur l’instant T et non pas un flux mesuré sur une période de temps, ce qui va déplaire selon lui aux gouvernements, puisqu’ils devront attendre de nombreuses années pour voir des changements sur certains indices de l’IDH, alors que les responsables politiques investissent en masse en parallèle pour changer la donne.

Enfin, il évoque le poids en termes de représentation, le fait que certaines variables soient plus importantes que d’autres, ce qui entraine des difficultés de quantification du poids de l’indicateur. Il explique d’ailleurs que l’importance dans cet index révèle finalement de choix sociaux de la part d’un individu.

Nous l’aurons compris, si l’IDH apparaît comme un outil intéressant et utile sur certains points, il faut tout de même évoquer ses faiblesses et la volonté de nombreux partis d’avoir recours à des outils complémentaires voir alternatifs afin de rendre compte du réel développement humain.


Bibliographie


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Julien Meunier, Laura Rey-Baron, Célestin Pineaud et Fayssal Yazami